Longtemps personnalité préférée des Français, l’abbé Pierre, de son vrai nom Henri Grouès, a fait l’objet d’un long article dans le journal La Croix, paru ce mercredi 17 juillet 2024. Selon le quotidien, celui qui a fondé le mouvement Emmaüs a été accusé par plusieurs femmes d’avoir eu des gestes inappropriés, dont certains ont été qualifiés d’agressions sexuelles. Emmaüs France a déclaré "rendre publics des faits qui peuvent s’apparenter à des agressions sexuelles ou du harcèlement sexuel, commis par l’abbé Pierre", peut-on lire dans un communiqué. Des faits qui se seraient déroulés "entre la fin des années 1970 et 2005".

Toujours d’après le communiqué, ce sont des "salariés, des volontaires et bénévoles de certaines de nos organisations membres, ou des jeunes femmes dans l’entourage personnel de l’abbé Pierre" qui seraient concernées. Ces accusations ont été prises très au sérieux par Emmaüs France qui "a mandaté un cabinet expert de la prévention des violences, le groupe Egaé, pour mener un travail d’écoute et d’analyse". Parmi les victimes présumées, il a été indiqué que "l’une d’entre elles était mineure au moment des premiers faits".

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L'abbé Pierre @ Gilles LEIMDORFER / AFP

Des faits prescrits ?

Pour le moment, ce sont sept femmes qui se sont dites victimes des supposés agissements de l’abbé Pierre. Elles n’ont cependant pas pu être entendues par la justice pour l’instant. À la suite d'un signalement fait en juin 2023, elles ont en revanche pu témoigner auprès du groupe Egaé, créé par les militantes féministes Caroline de Haas et Pauline Chabbert. Et leurs déclarations ont été jugées "suffisamment concordantes pour être prises au sérieux". Emmaüs a également incité d’autres potentielles victimes à se manifester, si elles n'ont pas encore pris la parole.

Nous saluons le courage des personnes qui ont témoigné et permis, par leur parole, de mettre au jour ces réalités.

Ont souligné Emmaüs France et la Fondation Abbé Pierre.

Cette information a suscité de nombreuses réactions et quelque peu divisé la Toile. Notamment car l’abbé Pierre a consacré la majeure partie de sa vie à défendre les sans-abris et le droit à un logement décent pour tous. Comme l’a rappelé La Croix, l’ancien résistant et auteur de l’appel du 1er mars 1954 n’était pas un saint puisqu’il s’était "affranchi des positions officielles de l’Église". De plus, il avait avoué avoir beaucoup de difficulté à respecter son vœu de chasteté.

Un premier témoignage fait se délier les langues

C’est en juin 2023 qu’une première femme a contacté les responsables d’Emmaüs, à qui elle a affirmé avoir subi une agression sexuelle de la part de l’abbé Pierre, au début de l’année 1980. Au retour d’un voyage en Italie, celui-ci aurait "introduit sa langue dans sa bouche d’une façon brutale et totalement inattendue". Le fondateur d’Emmaüs lui aurait par la suite fait d’autres propositions inconvenantes, avant de lui demander pardon en 2003, en présence de son père.

Comme l’a indiqué BFMTV, ce premier témoignage a entraîné l'ouverture d’une enquête menée par le cabinet Egaé, qui lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Douze entretiens ont été passés et ce sont finalement sept femmes qui auraient évoqué des faits similaires. L’une d’entre elles a évoqué des attouchements à la poitrine alors qu’elle se trouvait avec l’abbé Pierre dans une chambre d’hôtel. Les faits évoqués les plus anciens remonteraient à 1970. Les plus récents dateraient de 2005, soit deux ans avant la mort de l'abbé Pierre, qui était alors âgé de 92 ans.