Léo Grasset est le propriétaire de la chaîne YouTube DirtyBiology. Il y vulgarise la science depuis plusieurs années pour le plus grand plaisir de ses plus d'un million d'abonnés. Mais s'il était déjà célèbre sur la Toile, le jeune homme vient de se faire connaître du grand public pour une toute autre raison. Dans une longue enquête publiée par Mediapart ce jeudi 23 juin, sept femmes accusent Léo Grasset de violences sexuelles et psychologiques et une huitième l'accuse de viol.
Une dénommée Lisa (le prénom a été modifié), également connue sur Internet, aurait fait sa connaissance par l'intermédiaire de YouTube avant de vivre une relation amoureuse avec lui. Mais selon ses dires, cette romance n'avait rien d'idyllique :
J'ai eu excessivement peur. Le truc le plus excessivement malsain, c'est que j'étais retombée dans l'engrenage de l'admiration, de l'emprise.
A-t-elle confié à Mediapart. Et de raconter la fois où ils s'étaient retrouvés un soir de 2016 : "Je lui dis plusieurs fois que je n'ai pas envie (de faire l'amour)", s'est souvenue Lisa, qui affirme avoir vu une "espèce de switch dans son regard" lorsqu'elle a refusé l'acte. Léo Grasset l'aurait alors "maintenue avec ses mains autour du cou" et aurait forcé la pénétration "avec des coups très forts" :
J'ai voulu crier et il n'y avait aucun son qui sortait de ma bouche.
Une descente aux enfers
En larmes, Lisa a continué :
J'avais vraiment une espèce de dissonance cognitive maximum, où je me disais : " C'est la personne que j'aime et il vient de se passer ça".
Les mois suivants, Lisa aurait vécu "une descente", comme l'a révélé sa mère. Une période sombre durant laquelle elle aurait vu "des psys" et se serait bourrée de médicaments pour calmer ses multiples crises d'angoisse. D'après les sources contactées par Mediapart, Léo Grasset aurait ensuite tenté de la discréditer sur la Toile, la qualifiant de "plan c*l", "psychobitch" et de "mytho".
En 2019, Léo Grasset recontacte Lisa sur Facebook pour lui présenter ses excuses :
Je veux profiter de ce message pour m'excuser. (…) J'ai pas été correct avec toi quand on s'est revus en 2016. (…) Bon, c'était une période particulièrement bordélique de ma vie et ça va mieux maintenant. Mais ça n'excuse rien.
Lui aurait-il écrit.
Bien qu'elle se soit dite "détruite", Lisa n'a jamais voulu porter plainte contre le vidéaste, persuadée que cela aurait causé du tort à sa carrière :
Au mieux, je vais être considérée comme la fille qui a été violée. Au pire, tous les autres vidéastes vulgarisateurs vont se liguer contre moi.
A-t-elle déploré à Mediapart.
Un trouble du comportement ?
Quatre ans après le viol qu'elle aurait subi par Léo Grasset, une autre victime présumée s'est manifestée. Marine Perrin, qui a fréquenté Léo Grasset à l'été 2018, a révélé :
(…) Il a beaucoup de mal avec la notion de consentement. Par exemple, crier le mot "arrête" ne l'empêche pas du tout de continuer.
Selon elle, Léo Grasset est "dans l'idée de sexe brutal mais consenti" et serait atteint de sexomnie, "un trouble rare qui ressemble à du somnambulisme, avec des gestes, parfois brutaux, de nature sexuelle, parfois sans souvenirs au réveil" :
Je baise en dormant des fois. (…) Quand je suis dans cet état-là, je suis un peu animal. (…) Quand je suis éveillé, je fais vachement attention à l'autre (…) alors que quand je dors, je m'en balek.
Lui aurait avoué le YouTubeur par message.
Six autres femmes accusent également Léo Grasset de comportement "toxique" et de "violences psychologiques" du temps de leur relation. Le trentenaire aurait exercé sur elles une sorte "d'emprise" pendant des mois, en les poussant à bout, physiquement comme mentalement. Certains de ses anciens collaborateurs ont évoqué, toujours pour Mediapart, un comportement problématique sur leur lieu de travail, où Léo Grasset se plaisait à faire des "blagues" sexistes à connotation sexuelle.
Contacté par Mediapart pour s'expliquer, Léo Grasset n'a pas souhaité s'exprimer sur l'affaire :
Nous ne souhaitons pas répondre aux sollicitations de presse, M. Grasset se tenant à disposition de l'autorité judiciaire dans l'hypothèse où celle-ci était saisie de ces allégations.
Ont fait savoir ses avocats via un communiqué.
Léo Grasset a néanmoins réagi peu après la parution de l'article de Mediapart pour réfuter ces accusations :
Je conteste totalement les accusations relayées à mon encontre. J'ai toujours été attentif au respect du consentement de l'ensemble de mes partenaires.
Et d'ajouter qu'il ne fera pas de déclarations supplémentaires, "sur les conseils de {ses} avocats".
À ce jour, aucune plainte n'a encore été déposée contre le vidéaste.