Le magazine 13h15 Le Dimanche a consacré son dernier numéro du 9 février dernier au célèbre chef français Bernard Loiseau. Disparu en 2003, le restaurateur triplement étoilé semblait cependant insatisfait de sa réussite et ne cessait de se remettre en question. Le journaliste Philippe Labro, l'un de ses amis proches, a confirmé à l'émission de France 2 :
Vous avez affaire à la fois à un homme actif, énergique, talentueux, réussi... Et derrière ce masque, cette allure, il y a l'anxiété, l'inquiétude, l'incertitude, le doute. Or, le doute est la porte ouverte à la dépression et il y a toujours eu ça chez lui. Il le dissimulait, le planquait, mettait une chape de plomb sur ce monstre qu'est le doute.
Son épouse Dominique, qui n'a rien vu venir, a également témoigné pour l'émission. Si elle a décrit un mari dépressif et désabusé, notamment en hiver, elle n'imaginait pas à quel point le père de ses trois enfants était torturé :
Un jour, il avait plein de projets, puis, le lendemain, il mettait totalement en doute ces mêmes projets. Il y avait l'euphorie et ensuite l'inquiétude. Moi, j'ai cru que c'était son caractère...
"La bipolarité, il y a trente ans, on ne la connaissait pas"
Bernard Loiseau était-il bipolaire ? C'est ce qu'a affirmé la veuve du chef cuisinier, évoquant de sérieux passages à vides qui perduraient depuis des années :
Depuis, je sais qu'il était en fait bipolaire. Mais la bipolarité, il y a trente ans, on ne la connaissait pas. Les quelques jours qui ont précédé son décès, il était particulièrement anxieux, négatif... Mais comme il nous a toujours fait des coups comme ça l'hiver, on ne pouvait pas imaginer quoi que ce soit...
Seulement, en février 2003, le célèbre guide gastronomique Gault et Millau baisse la note de Bernard Loiseau de 19,5/20 à 17/20. Le coup de grâce pour un homme qui avait beaucoup de mal à croire en son talent et angoissait à l'idée de perdre l'une de ses précieuses étoiles Michelin.
Il se suicidera le 24 février de la même année avec son fusil de chasse, à son domicile de Saulieu.
Philippe Labro s'est souvenu :
Le ver est entré dans le fruit le jour où il y a eu cette rumeur maligne, féroce, de certaines personnes qui ont fait savoir qu'il perdrait peut-être sa troisième étoile... Je l'ai eu plusieurs fois au téléphone à ce moment-là et j'ai senti que toutes ces barrières qu'il avait érigées entre sa positivité et son angoisse, son anxiété, avaient pété.