"Au revoir Henrik", titrait en français le quotidien de référence Politiken, avec une photo du prince jeune faisant un signe de la main.
Né Henri Marie Jean André de Laborde de Monpezat, Henrik de Danemark s'est éteint mardi 13 février à 23h18 entouré de sa femme et de leurs deux fils.
Ses funérailles seront célébrées dans l'intimité le 20 février dans la capitale. La moitié de ses cendres seront dispersées en mer, au large du Danemark, l'autre inhumée dans une urne sur le domaine du château royal de Fredensborg, situé à une quarantaine de kilomètres au nord de Copenhague.
Atteint de démence, le prince avait été hospitalisé fin janvier pour une infection pulmonaire.
Le Premier ministre danois Lars Løkke Rasmussen a confié :
Le prince Henrik a représenté le Danemark avec excellence. Son engagement était communicatif, et ses connaissances énormes.
Le président français Emmanuel Macron a rendu hommage à son implication en faveur de la "longue et inaltérable amitié entre la France et le Danemark, deux nations dont l'alliance ne fut jamais rompue".
Visage jovial, regard pétillant à peine caché par des verres discrets, le prince avait la réputation d'être un bon vivant friand de bonne chère, de vin et de poésie. Mais ses accès de colère et son style flamboyant, dans un pays qui valorise l'humilité et la discrétion, ont longtemps irrité.
Le quotidien conservateur Jyllands-Posten constatait :
Le Danemark a perdu un intellectuel, un artiste et homme amusant qui, avec son expérience internationale, a fini par gagner le coeur des Danois sceptiques et a contribué à faire de la monarchie danoise l'une des plus populaires d'Europe.
Un prince retraité
Depuis le 1er janvier 2016, Henrik était retraité, libéré de ces obligations officielles qu'il honorait diversement selon son humeur.
En avril 2015, il s'était fait porter pâle lors des célébrations du 75e anniversaire de la reine, mais avait été aperçu à Venise quelques jours après, s'attirant railleries et foudres de la presse à grand tirage.
Et l'été dernier il avait publiquement fait savoir qu'il refusait d'être inhumé avec sa femme dans la nécropole royale de la cathédrale de Roskilde.
N'ayant pas obtenu le titre de roi, et bien qu'il fût "altesse royale", il arguait qu'il n'était pas son égal dans la vie et ne souhaitait pas l'être dans la mort.
La ministre danoise de la Culture, Mette Bock, a dénoncé mercredi sur sa page Facebook "l'hypocrisie" de ceux des Danois qui lui rendent hommage après l'avoir "maltraité" pendant des décennies.
Né le 11 juin 1934 à Talence, près de Bordeaux (sud-ouest de la France), le jeune et fringant comte avait épousé en juin 1967 Margrethe, couronnée en janvier 1972.
Après une enfance indochinoise dépensée sur les plantations familiales, Henri embrasse la carrière diplomatique et c'est à Londres qu'il rencontre Margrethe, alors héritière de la couronne danoise.
En l'épousant, il change de prénom, renonce à sa nationalité française pour devenir danois et abjure sa foi catholique pour le protestantisme. Surtout, il se résigne bon gré mal gré à mettre ses pas dans ceux de Margrethe que ses sujets adorent.
"J'accepte de jouer le jeu. Mais c'est très dur pour un homme de ne pas être considéré sur le même plan que son épouse", admet-il dans ses mémoires, "Destin oblige", publiés en 1997.
Vin et Citroën
Tout ce que je faisais était critiqué. Mon danois était bancal. Je préférais le vin à la bière, les chaussettes en soie aux chaussettes en tricot, les Citroën aux Volvo, le tennis au football.
Ce n'est qu'en 1984, douze ans après l'accession au trône de son épouse qu'il obtient son propre apanage, prélevé sur celui de la Reine.
En 2002, c'est le drame : la reine Margrethe grippée demande au prince héritier, Frederick, de la remplacer pour la lecture des voeux.
Ni une ni deux, le prince-consort quitte Copenhague furieux pour se réfugier dans sa propriété vinicole de Cayx (ou Caïx) dans le Lot où il était très impliqué.
Le couple royal avait deux enfants, Frederick, 49 ans, et Joachim, 48 ans.